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SAINTE ODILE, VIERGE, PREMIÈRE ABBESSE DE HOHENBOURG, PATRONNE DE L'ALSACE  (+720 AD)
 

Odilia, suae decus et praesidium patriae.
Chère Eglise d'Alsace, invoque dans tes jours de deuil 
l'héroïne que le Ciel t'a donnée pour protectrice.
(Propre de Strasbourg)


Coucher du soleil sur le Mont-Sainte-Odile - vue du 3ième étage de l'hospitalité : 
la statue de sainte Odile, bénissant et protégeant l'Alsace et celles et 
ceux qui se confient à elle. (17/8/2004)


Au milieu du 7ième siècle vivait, en Alsace, un seigneur puissant nommé Adalric. Il descendait, par son père Leudèse, du célèbre Archambaud ou Erchinoald, maire du palais sous Clovis 2, et sa mère Hultrude était, dit-on, la fille de Sigismond, roi de Burgondie. Adalric habitait ordinairement la ville d'Oberehnheim, située au pied de la montagne de Hohenbourg, en Alsace. C'est là qu'il rendait la justice à ses vassaux; les historiens du temps nous le représentent comme un homme droit, sincère, libéral, ferme dans ses résolutions et véritablement Chrétien... Adalric avait épousé Bérhésinde ou Berswinde, nièce de saint Léger, évêque d'Autun. Outre l'éclat de la naissance, on admirait en elle une piété sincère, qui ne se démentit jamais. Cette alliance augmenta encore le crédit d'Adalric, et le roi lui donna l'investiture du duché d'Allemagne ou d'Alsace, à la mort du duc Boniface.

Tout semblait concourir au bonheur d'Adalric et de son épouse. Berswinde, humble au milieu des grandeurs, ne profitait de ses richesses que pour les répandre dans le sein des pauvres. Chaque jour elle se retirait dans la partie la plus isolée de son palais, pour consacrer ses loisirs à la lecture des livres saints et aux exercices de la piété. Adalric aimait aussi à se dérober au tumulte des affaires pour se recueillir dans la méditation des vérités Chrétiennes. Il désirait vivement posséder une résidence éloignée des bruits du monde, afin de s'y retirer de temps en temps avec son épouse. Il ordonna donc à quelques-uns de ses officiers de parcourir les solitudes voisines, et de choisir celle qui serait le plus propre à l'exécution de son dessein. Quelque temps après, les fidèles serviteurs du duc vinrent lui annoncer qu'ils avaient découvert, au sommet de la montagne même de Hohenbourg, les vastes ruines d'anciens édifices, et que ce lieu était très-convenable pour y construire, selon son désir, une maison et une église. (*)

(*) La montagne de Hohenbourg portait primitivement le nom d'Altitona. L'origine de son château remonta aux temps Celtiques. Les chefs de cette contrée formèrent une sorte de république fédérative sous la protectIon du seigneur d'Altitona. Les peuples qui habitaient la plaine lui payaient un tribut sous la condition que, lorsqu'ils seraient attaqués, il leur donnerait asile, à eux et à leurs troupeaux, dans l'enceinte du château d'Altitona. Pour y protéger cette multitude de vassaux, on construisit autour du sommet de la montagne une muraille de 3 lieues de circuit, de 15 pieds de haut, et de 6 piedsde largeur. C'était une construction gigantesque, dont on voit encore aujourd'hui les restes. C'est là que les peuples d'Alsace se retiraient à la moindre alarme. Mais cet immense rempart ne put résister à la conquête romaine. Les soldats de Jules César envahirent les murs d'Altitona, et conservèrent cette citadelle, qui fut occupée par les Romains jusqu'aux invasions des Barbares. C'est alors que les Germains s'en emparèrent (vers l'an 440), et la démolirent en grande partie. La montagne reçut alors le nom de Hohenbourg, qui signilie, comme Altitona, château fort. Elle resta inculte et inhabitée jusqu'au temps où le duc Adalric releva les ruines de cette ancienne citadelle.


Adalric agenouillé tend son bâton au Christ. 
De gauche à droite : saint Pierre, la Mère de Dieu, le Christ, saint Jean le Baptiste et sainte Odile 
:

Hortus Deliciarum, Mont-Sainte-Odile, 12eme s. 

Adalric se rendit lui-même au lieu indiqué. Il fut charmé du site de Hohenbourg, et y fit aussitôt bâtir 2 chapelles. L'une fut dédiée aux saints apôtres Pierre et Paul, patrons d'Oberehnheim, et l'autre fut consacrée par saint Léger, évêque d'Autun, sous l'invocation des saints protecteurs de l'Alsace (*).
Le duc fit aussi relever les murs de l'ancien château et construire une maison de retraite, où il pût résider avec Berswinde pendant la saison d'été, et goûter, loin du monde, les charmes de la solitude.

(*) Cette chapelle était une rotonde, soutenue par 6 colonnes, et, d'après une tradition ancienne, elle avait été consacrée autrefois, sous le nom de Panthéon, aux divinités païennes. Ainsi Adalric n'aurait fait qu'en changer la destination. Elle a été détruite en 1734, et une auberge a été construite sur son emplacement.)

Une seule chose manquait au bonheur d'Adalric. Il n'avait point d'enfant, et cette disgrâce l'affligeait vivement; car tous les avantages dont il jouissait lui semblaient peu de chose, s'il ne pouvait les transmettre à un héritier de son nom et de sa fortune. A cette occasion, Berswinde priait ardemment, et ses voeux ardents, ses jeûnes, ses aumônes, attirèrent enfin sur eux les bénédictions du Ciel. Berswinde cessa d'être stérile, et les sujets du duc, s'associant à son bonheur, attendaient avec anxiété la naissance de l'héritier d'Adalric.
Ce jour si désiré arriva enfin. Mais il arriva trop tôt pour le repos d'Adalric, dit un historien; il s'était flatté d'avoir un fils, et Dieu lui donna une fille, et une fille aveugle (657). Alors la joie du duc se changea en une colère profonde, et son espérance en désespoir; l'amour paternel qu'il avait conçu pour cet enfant à venir, dégénéra en une fureur qui serait difficile à comprendre dans un homme présenté comme si vertueux, si sa vertu n'eût eu quelque chose de bizarre et d'irrégulier.

Adalric exhala sa douleur en plaintes amères, regardant la naissance de cette enfant comme une malédiction de Dieu sur sa famille. Mais Berswinde, quelque affligée qu'elle fût du malheur de sa fille, l'était encore plus des discours d'Adalric. Elle s'efforça de le calmer en lui rappelant que Dieu les avait comblés de biens jusqu'à ce jour, et qu'il fallait encore le bénir de leur avoir donné cette enfant, qui servirait peut-être à manifester Ses oeuvres et Sa puissance.

Ces douces paroles ne réussirent point à apaiser la colère d'Adalric. Il répétait que si la naissance de sa fille venait à être connue, l'honneur de sa race en serait obscurci. Tant est faible la vertu de l'homme! L'illusion de la disgrâce imprévue la déconcerte et l'abat dans ceux mêmes où elle paraissait le mieux affermie. Enfin, Berswinde compris qu'elle n'avait rien à attendre de son époux pour son enfant, sinon la mort. Elle décida qu'on transporterait secrètement sa fille dans un lieu inconnu, où elle serait élevée loin des yeux de ses parents.

Berswinde se souvint alors d'une femme qui avait été autrefois attachée à son service, et qui demeurait alors à Scherwiller, à 2 lieues de Schélestadt. Elle crut pouvoir compter sur la fidélité de cette étrangère, qu'elle avait comblée de ses bienfaits, et l'ayant l'ait venir auprès d'elle, elle remit sa fille entre ses mains. "Veillez sur cette enfant", lui dit-elle, "élevez-la secrètement comme si elle était votre fille, et que le Seigneur Jésus et la Vierge Marie la protégent, ainsi que vous, tous les jours!" La nourrice emporta l'enfant dans sa demeure, et prit soin de cacher sa naissance aux habitants du pays.

Adalric ignorait le lieu où avait été transportée sa fille; car, pour ne pas l'irriter, on évitait soigneusement de parler d'elle en sa présence. Il y avait bientôt un an que la jeune princesse avait été mystérieusement confiée à sa nourrice, lorsque le bruit se répandit dans la province qu'on élevait soigneusement à Scherwiller une petite aveugle dont les parents étaient inconnus, mais que son air noble et les soins dont on l'entourait indiquaient assez qu'elle appartenait à une grande famille. Quelques-uns même observèrent que la nourrice avait été autrefois au service de Berswinde, et que l'âge de l'enfant répondait parfaitement au temps où l'on avait publié que la duchesse avait fait une fausse couche.

La nourrice informa Berswinde de tous ces discours, et celle-ci, craignant que ces bruits ne parvinssent aux oreilles d'Adalric, résolut de faire un nouveau sacrifice pour ne pas l'irriter davantage. Elle ordonna à la nourrice de transporter sa fille au monastère de Baume-les-Dames, dans le comté de Bourgogne, où elle pourrait continuer à l'élever. Ce lieu paraissait plus convenable que tout autre pour servir de refuge à la jeune princesse, parce que la distance la mettrait à l'abri des recherches, et que, de plus, l'abbesse de Baume était la tante de la duchesse Berswinde.

La jeune exilée y fut reçue avec joie, et l'abbesse l'entoura de tous les soins qui peuvent suppléer à la tendresse d'une mère. La fille d'Adalric grandit en âge et en sagesse au sein de cette famille adoptive. Son âme ne s'ouvrit que pour connaître Dieu et aimer la vertu. Elle montra, d'ailleurs, une grande douceur de caractère et une facilité étonnante à retenir ce qu'on lui enseignait, de sorte que, dès l'âge de 5 ans, elle était parfaitement instruite des principes de la vie du Chrétien. Privée de la lumière corporelle, elle recevait abondamment cette Lumière d'En Haut, qui éclaire tout homme venant au monde.

Nous ignorons le nom sous lequel on désignait alors la fille d'Adalric; car, arrivée à l'âge de 12 ans, elle n'avait pas encore eu le bonheur de recevoir le saint Baptême. C'était peut-être un reste de la coutume suivie au 6ième siècle, où l'on différait le baptême des enfants jusqu'à ce qu'ils eussent atteint "l'âge de raison". Quoi qu'il en soit, Dieu parut avoir destiné cette jeune fille à entrer dans la voie des élus par une porte miraculeuse, en lui rendant la vue du corp en même temps que celle de l'âme. En ce temps-là, le bienheureux Erhard était évêque de Ratisbonne, en Bavière (Regensburg). Un jour, il eut une vision dans laquelle Dieu lui dit de se rendre aussitôt au monastère de Baume. "Et là, tu trouveras", lui dit la voix d'En Haut, "une jeune servante du Seigneur. Elle est aveugle dès sa naissance. Tu la baptiseras, tu lui donneras le nom d'Odile, et au moment de son Baptême, ses yeux s'ouvriront à la lumière". Saint Erhard partit sans différer, et au lieu de prendre la voie directe, se dirigea du côté des Vosges. Son dessein était de visiter d'abord l'abbaye de Moyen Moutier, où son frère Hidulphe s'était retiré, après avoir quitté volontairement le siège épiscopal de Trèves. Hidulphe, qui menait en ces lieux une vie angélique, fut charmé de revoir Erhard, et quand il connut le sujet de son voyage, il voulut l'accompagner au monastère de Baume. Les deux Saints trouvèrent la fille d'Adalric parfaitement instruite de tous les vérités de la Foi Chrétienne.

Saint Erhard commença la cérémonie. Selon le rituel Chrétien originel, il plongea la jeune aveugle dans les eaux sacrées, et saint Hidulphe l'ayant relevée, Erhard lui fit sur les yeux les onctions du saint chrême, en disant: 
"Au Nom de Jésus-christ, sois désormais éclairée des yeux du corps et des yeux de l'âme". Tout le monde était dans l'attente du prodige : ce ne fut pas en vain; le Ciel agit suite à la parole du saint homme. Saint Erhard imposa à la nouvelle Chrétienne le nom d'Odile, c'est-à-dire "fille de lumière", ou "Dieu est ton soleil"; nom glorieux que Jésus-Christ Lui-même avait indiqué, et qui devait rappeler sans cesse à la fille d'Adalric le bienfait dont elle avait été favorisée par le Ciel. Les spectateurs de cette scène, frappés de joie et d'étonnement, bénissaient le Seigneur qui venait de faire éclater Sa Miséricorde et Sa puissance.

Ensuite le saint évêque bénit un voile, qu'il déposa sur la tête d'Odile, et lui fit présent de quelques saintes reliques, en lui annonçant que Dieu lui réservait encore des grâces merveilleuses, si elle se montrait fidèle aux faveurs dont Il l'avait comblée en ce jour. Avant de partir, il bénit la jeune baptisée, la recommanda à l'abbesse de Baume et aux moniales qui avaient veillé sur son enfance, et partit avec son frère Hidulphe. Adalric ne pouvait manquer d'apprendre le miracle que Dieu avait accompli en faveur de sa fille, et comme l'abbaye de MoyenMoutier, où résidait Hidulphe, n'était qu'à une faible distance de Hohenbourg, Erhard chargea sort frère de communiquer au duc une si agréable nouvelle, qui devait lui inspirer des sentiments plus favorables envers Odile. Hidulphe se rendit auprès du duc Adalric, lui raconta tous les détails du Baptême de sa fille, et réveilla dans son coeur cette affection paternelle que les passions mauvaises n'étouffent que rarement tout à fait. Adalric fut enchanté du récit de saint Hidulphe, et pour lui témoigner sa reconnaissance, il donna à son monastère de MoyenMoutier la terre de Feldkirch, que cette abbaye posséda jusqu'au 18ème siècle. "Cependant", dit l'historien de la Sainte, "il ne rappela pas Odile chez lui, soit qu'il craignît que la présence de cette fille miraculeuse ne fût pour lui un reproche continuel des duretés qu'il avait eues pour elle, soit qu'il crût qu'il serait mieux de la laisser encore à Baume, auprès de sa tante, afin qu'elle se fortifiât dans la vertu".

Odile resta donc à Baume, où elle continua à se montrer toujours pieuse, toujours appliquée à l'étude et au travail. Les exemples de vertu dont elle était entourée n'étaient pas perdus pour elle, et malgré sa jeunesse, l'ardeur de son zèle, la ferveur de sa dévotion et la maturité de son esprit l'élevaient au rang des moniales les plus pieuses du monastère. Quoiqu'elle n'eût pas fait profession, elle observait scrupuleusement toutes les prescriptions de la Règle, et remplissait, comme les autres, tous les emplois qui lui étaient assignés.

Pendant ce temps, la maison de son père avait été comblée des bénédictions du Ciel. Dieu avait donné à Adalric 4 fils et une seconde fille, qui fut nommée Roswinde. L'aîné des jeunes princes s'appelait Etichon ou Etton, le second Adelbert, le troisième Hugues, et le dernier Batachon. Ils furent l'ornement de leur maison, la gloire de l'Alsace, et la souche des illustres familles qui régnèrent sur l'Autriche, la Lorraine, le pays de Bade et d'autres contrées. Parmi tous ces nobles enfants, Hugues semblait se distinguer des autres par ses qualités éminentes. C'était un prince bien fait, plein d'esprit, de coeur et de générosité, et surtout de cette confiance qu'une première jeunesse soutenue d'une verti naissante, inspire ordinairement aux personnes qui se connaissent et qui sentent ce qu'elles sont.

Odile entendit en parler, et l'aima, sans l'avoir jamais vu, d'une vive affection. Elle lui écrivit des lettres pleines de tendresse, qu'elle confia à un pèlerin. Le jeune Hugues, touché de cette marque d'attachement, répondit à sa soeur dans les termes de l'amitié la plus sincère. Odile, charmée des sentiments de son frère, résolut de l'employer comme intercesseur auprès d'Adalric. Elle le pria donc de fléchir l'esprit de son père, et de ménager auprès de lui son retour au château de Hohenbourg. Sa mission était délicate. Mais Hugues, dont le coeur était bon, crut facilement que le duc serait sensible à la démarche de sa fille. Un jour, il fit en sa présence l'éloge des qualités de l'esprit et du corps qu'on admirait dans Odile, et finit par conjurer Adalric de la rappeler dans sa maison, dont elle devait faire le plus bel ornement.

Le duc répondit laconiquement qu'il avait des motifs de la laisser encore à Baume, et son fils n'osa pas insister. Mais, persuadé que la présence de sa soeur suffirait pour dissiper tous les obstacles, il fit préparer secrètement un char et des chevaux qu'il lui envoya, en lui écrivant qu'elle pouvait revenir à Hohenbourg. Odile, persuadée que son père consentait à son retour, fit aussitôt ses adieux à l'abbesse et aux moniales de Baume, en leur promettant de revenir bientôt pour se consacrer avec elles au service. de Dieu. Elle partit, un peu inquiète et flottant entre la crainte et l'espérance. Mais la prière la soutint dans la route, et, après avoir traversé 2 provinces, elle arriva heureusement au pied de la montagne où Adalric avait relevé les ruines du château de Hohenbourg. 

Dans ce moment même le duc se promenait dans la campagne, en conversant familièrement avec son fils. Tout à coup il aperçut une troupe qui s'avançait vers la montagne, et demanda ce que c'était. Hugues, informé du retour de sa soeur, répondit que c'était Odile qui revenait à la maison paternelle. "Qui a été assez audacieux", s'écria Adalric, "pour la rappeler sans ma permission?" Le jeune Hugues, reconnaissant alors qu'il avait trop compté sur la tendresse de son père, répondit en tremblant : "C'est moi qui lui ai mandé de revenir. Pardonnez à ma témérité et à l'affection que j'ai ressentie pour une soeur. Si j'ai mérité votre colère, punissez-moi seul, car Odile n'est pas coupable". Le duc, emporté par un premier mouvement de colère, frappa rudement le jeune homme. Mais son courroux s'apaisa, et quand Odile, arrivée au sommet de la montagne, vint se jeter à ses pieds et lui baiser les mains, la nature reprit son empire, et le duc, l'ayant embrassée, la présenta à ses frères qui l'accueillirent avec joie. Bientôt la duchesse Berswinde, avertie du retour de sa fille, accourut à sa rencontre, et baisa avec respect ses yeux, que Dieu avait si miraculeusement ouverts à la lumière du jour.



Odile, rentrée au château de Hohenbourg, se rendit au pied des autels pour remercier Dieu de l'avoir ramenée dans sa famille. Sa vie à la cour de son père fut toujours un modèle d'édification. Sa piété et sa douceur charmaient tous ceux qui l'entouraient, et ses parents, touchés de son obeissance, sentaient de jour en jour revenir leur affection pour elle. Son père seul semblait lui porter moins d'affection qu'à ses autres enfants. Il ne voulait pas l'admettre à sa table et lui faisait servir ses repas dans une partie écartée du château. Un jour cependant il la rencontra dans la cour et lui dit, d'un ton plus affectueux que de coutume : "Où vas-tu, ma fille?" - "Seigneur", répondit Odile, "je porte un peu de nourriture à de pauvres malades". La douceur de ses paroles et son air modeste, émurent vivement le duc. Il se repentit de sa froideur envers un enfant si aimable et lui dit : "Ne t'afflige pas, ma fille, si tu as vécu pauvrement jusqu'ici, il n'en sera plus ainsi à l'avenir". Dès lors il lui témoigna dans toutes les circonstances une bienveillance normale. Odile, loin de s'en prévaloir, ne s'en montra que plus douce et plus dévouée aux bonnes oeuvres. Ses exemples eurent la plus salutaire influence sur sa famille, et sa soeur Roswinde résolut de marcher sur ses pas en renonçant comma elle aux vanités du monde, pour soulager les pauvres et porter la croix de Jésus-Christ. 

Adalric songea alors à marier Odile à quelque puissant seigneur de ses amis. Mais elle avait bien d'autres pensées. La vie tumultueuse des cours la fatiguait, et elle songeait à retourner dans la solitude de Baume. Adalric, à qui elle fit connaître son dessein, s'y opposa, et malgré ses instances et ses larmes, elle ne put abtenir la permission de son père. Odile fut vivement contrariée de cet obstacle. Elle écrivit à sa tante et aux moniales de Baume une lettre touchante pour leur exprimer sa douleur. L'abbesse regretta sensiblement l'éloignement d'Odile, et, pour conserver d'elle un souvenir plus sensible, elle garda soigneusement et avec le plus grand respect un voile violet, mèlé de soie et de filets d'or, que la Sainte avait travaillé de ses mains, et qui fut vénéré dans l'abbaye de Baume jusqu'au 18ème siècle.

Sainte Odile, Patronne de l'Alsace, En pied, face 


Odile fut donc obligée de rester malgré elle à Hohenbourg. La renommée de ses qualités éminentes y attira bientôt les personnes les plus distinguées. Un duc de Germanie, intéressé financièrement et politiquement par une alliance, demanda sa main à Adalric. Le duc et la duchesse voyaient dans cette alliance un avenir brillant pour leur fille. Ils donnèrent leur consentement; mais lorsqu'ils demandèrent celui d'Odile, elle répondit, avec autant de fermeté que de respect, qu'elle ne voulait pas avoir d'autre époux que Jésus-Christ, à Qui elle avait voué son coeur, et à Qui elle avait été consacrée par le saint évêque Ehrard. Quelques jours après, craignant les mesures qu'on voulait prendre pour contraindre sa liberté, elle s'enfuit secrètement, déguisée sous l'habit d'une mendiante. Son dessein était d'abord de se rendre à Baume; mais, ayant réfléchi qu'on ne manquerait pas de la chercher de ce côté, elle traversa le Rhin sur une barque, et résolut de chercher une solitude inconnue, où elle pût vivre loin du monde (619).

Quand on s'aperçut au château de Hohenbourg qu'Odile avait disparu, le duc ordonna à ses fils de se mettre aussitôt à sa recherche. Il se dirigea lui-même du côté du Rhin, et prit le chemin de Fribourg en Brisgaw. C'était justement celui que suivait sa fille : cependant, malgré toutes ses recherches, Adalric ne put la découvrir, et elle resta cachée pendant plusieurs mois à Fribourg ou dans les environs. La "Chronique de Fribourg" raconte que dans sa fuite, Odile, arrivée près de Fribourg, se voyant sur le point d'être rattrapée par une troupe de cavaliers conduite par son père, pria le seigneur de venir à son aide; qu'alors le rocher qui la couvrait s'entr'ouvrit pour la dérober à la recherche de ceux qui la poursuivaient. Odile y entra, et le rocher se referma sur elle. Quand le danger fut passé, le rocher s'ouvrit de nouveau pour rendre la liberté à la sainte. On montrait à Meusbach, près de Fribourg, une chapelle élevée, disait-on, par sainte Odile, en action de grâces de ce miracle.
Adalric, furieux de son absence mais ne sachant plus que faire, fit publier dans ses Etats qu'il s'engageait solennellement, si Odile revenait à Hohenbourg, à lui laisser toute liberté d'embrasser le genre de vie qu'elle désirait. Promesse d'un tel homme valant normalement fort peu.
Cet édit parvint à la connaissance d'Odile. Elle en rendit grâces à Dieu, voulu prendre le risque de croire à une conversion paternelle et consentit à retourner à Hohenbourg (680). Contre toute attente, le duc se montra fidèle à sa promesse, et quand sa fille lui eut fait connaître le désir qu'elle avait d'établir en Alsace une communauté de vierges consacrées à Dieu, il accepta cette proposition et voulut contribuer généreusement à cette oeuvre.

Aussitôt il céda à Odile le château même de Hohenhourg avec toutes ses dépendances, et cette antique forteresse, transformée par Adalric en une résidence somptueuse, fut destinée à devenir, entre les mains de la Sainte, un asile ouvert aux âmes qui se vouer au Seigneur tout en s'éloignant de la vie mondaine.
Ce fut entre les années 680 et 690 que se firent les travaux nécessaires pour adapter la maison de Hohenbourg à sa nouvelle destination. Le duc pourvut libéralement à toutes les dépenses et présida souvent lui-même à l'ouvrage. Quand les bâtiments furent terminés, Odile en prit possession, à la tête d'une communauté de 130 moniales d'origines diverses, et qui avaient renoncé, comme elle, à toutes les espérances du monde pour venir à Hohenbourg se ranger sous la conduite d'une maîtresse si habile dans la science du Salut. 


Adalric remet les clés d'Hohenbourg à sa fille sainte Odile :

Hortus Deliciarum, Mont-Sainte-Odile, 12eme s. 


Cette communauté, si prospère dès sa naissance, jeta un grand éclat dans la province. La sainteté de l'abbesse et la ferveur des moniales firent regarder la solitude de Hohenbourg comme l'asile de la vertu la plus pure. Sainte Odile, animée de l'esprit de Dieu, ne se contentait pas d'enseigner, par ses discours, les maximes de la vie spirituelle; elle y amenait ses moniales par ses exemples, qui sont toujours la meilleure manière d'instruire, la plus courte et la plus efficace. Le duc Adalric, témoin de cette régularité, en exprima sa joie par de nouveaux bienfaits. Il fit une fondation à perpétuité pour 100 jeunes filles qui voudraient se consacrer au service de Dieu dans le monastère d'Hohenbourg. Il y ajouta 14 bénéfices pour les prêtres chargés du service religieux. Ces propriétés données par le Duc Aldaric à la communauté d'Hohenbourg seraient mentionnées dans des textes attribués à sainte Odile et dans des bulles papales d'après le Schisme, ainsi qu'une lettre de l'empereur Louis 1er. Vu la datation des textes et les faux en usage à l'époque, et le fruit amer qu'eut à manger la communauté par la suite, cette "magnifique dotation" ressemble fortement aux faux forgés pour assurer des biens terrestres, dans les disputes de propriétés foncières et de pouvoir temporel entre monastères, évêchés et princes séculiers d'après 1054. D'après les R.P. Bénédictins de Paris, édition Letouzey & Ané 1956, citant diverses sources d'érudits, c'est durant la guerre de possessions temporelles entre Hohenbourg et NiederMunster que ce dernier monastère forgea le faux appelé "testament de sainte Odile", document qui comprend des affirmations de donations diverses. On ne trouve qu'une citation ancienne, en 1050, chez Léon 9, évêque de Rome d'origine alsacienne, parlant des possessions "de l'église de la Mère de Dieu où repose le corps de sainte Odile, au lieu dit Hohenbourg". Toujours est-il, qu'il s'agisse des authentiques ou des faux, après la déchéance spirituelle de l'Occident, ces revenus devinrent une charge pour ce haut lieu. Une fondation magnifique engagea dans la suite l'empereur Frédéric Barberousse à donner le titre de princesses du "saint-empire" aux abbesses de ce riche monastère. On était aux antipodes de sainte Odile! 


Déchéance spirituelle :

Hortus Deliciarum, Mont-Sainte-Odile, 12eme s. 


Les 2 chapelles que le duc Adalric avait fait bâtir à Hohenbourg étaient insuffisantes pour les besoins de la nouvelle communauté. Odile obtint de son père toutes les ressources nécessaires pour construire une église belle et spacieuse, qui fut consacrée sous le vocable de Notre-Dame (690). Un oratoire, également dédié à la Vierge, était attenant à cette église. C'est dans ce sanctuaire qu'Odile aimait à se retirer pour se recueillir dans la prière, et satisfaire sa dévotion envers la Mère de Dieu. A quelques pas de l'oratoire de la Vierge, elle fit encore bâtir une autre chapelle, sous l'invocation de la Sainte-Croix, pour honorer, par une dévotion spéciale, le bois sacré sur lequel s'est accompli le mystère de la rédemption. Enfin elle éleva un 3ème oratoire à saint Jean le Baptiste, qu'elle honorait particulièrement depuis le jour où elle avait recouvré la vue par le baptême. L'historien contemporain de la Sainte raconte que cette dernière chapelle fut miraculeusement consacrée par saint Pierre, qui y apparut, aux yeux d'Odile, entouré d'une troupe d'Anges, et cette dédicace merveilleuse fut fêtée chaque année sous le nom de Consécration des Anges (696) Cette chapelle miraculeuse fut plus tard appelée la chapelle de Sainte-Odile, parce que c'est là que la Sainte fut inhumée et honorée jusqu'à ces derniers temps par les fidèles, qui venaient en foule y offrir leurs prières et leurs voeux. Outre ces oratoires, on voyait encore à Hohenbourg l'ancienne chapelle bâtie par Adalric, dans laquelle furent inhumés son fils Hugues et sa fille Roswinde. Odile y avait fait creuser 2 tombeaux où l'on déposait successivement les défuntes moniales, pour les transporter ensuite, lorsque les chairs étaient consumées, dans les caveaux destinés à leur sépulture. Une pratique toujours actuelle en Grèce nottament. Une 5ème chapelle, bâtie par Odile, portait le nom de Chapelle-des-Larmes; une 6ème enfin, suspendue sur la pente d'un rocher, s'appelait la Chapelle-Pendante, ou encore la Chapelle-des-Anges, auxquels elle était dédiée. Il semblait, dit l'historien, que la bienheureuse Odile voulait changer tout Hohenbourg en chapelles.

C'est ainsi qu'Odile sanctifiait cette solitude de Hohenbourg. Elle voulait que tout y rappelât la pensée du Ciel. Comme elle avait une dévotion spéciale à la sainte Trinité, pour se rappeler d'une manière sensible ce Mystère, elle planta de sa main 3 tilleuls auprès du monastère. Deux de ces arbres séculaires, qui subsistaient encore en 1681, furent alors détruits par l'incendie qui dévora le monastère.

Au milieu des oeuvres saintes qu'on pratiquait à Hohenbourg, une chose importante manquait à la pieuse communauté. Les pieuses filles réunies en ce lieu y pratiquaient la régularité, moins par un engagement explicite que par émulation et par ferveur; en un mot, elles n'avaient pas encore de Règle monastique. Quand Odile eut mis la dernière main aux édifices matériels, elle songea à donner à sa communauté des règlements précis. Pour cela, elle assembla toutes ses filles afin de prendre leur avis, et leur demanda quel genre de vie elles voulaient embrasser de préférence. Toutes répondirent que la vie la plus austère leur paraissait la plus parfaite, et que leur voeu le plus cher était de marcher sur les traces de leur abbesse, en suivant la voie étroite qu'elles avaient suivie volontairement jusqu'alors. Cette vie était dure, car Odile ne se nourrissait que de pain d'orge et de légumes; elle ne buvait que de l'eau, excepté les jours de fêtes; elle passait une partie des nuits en prière et prenait à peine quelques heures de repos; elle n'avait d'autre lit qu'une peau d'ours, et n'accordait enfin à son corps que ce qui était absolument nécessaire pour soutenir son existence.

Le zèle qu'elle avait pour la sanctification des âmes la porta à entreprendre une nouvelle oeuvre. Les sanctuaires de Hohenbourg étaient visités par un grand nombre de pèlerins. Mais ceux qui étaient infirmes ne pouvaient que difficilement atteindre le monastère, situé au sommet de la montagne. Odile, secondée par les pieuses libéralités de sa mère, Berswinde, fit bâtir pour ces malheureux un hôpital et une église dédiée à saint Nicolas, au pied de la montagne. Malgré la difficulté des chemins, elle visitait ces pauvres tous les jours, les servait avec affection et leur distribuait l'aumône de ses propres mains.

L'hospice ainsi que le couvent qui y furent construits n'existent plus qu'à l'état de ruines. La chapelle de Saint-Nicolas a été restaurée et presque reconstruite au 19ème siècle, par le gouvernement français, en style roman, proche de celui du temps de sainte Odile.

Les moniales de Hohenbourg admiraient le généreux dévouement de leur abbesse. Charmées de ses exemples, elles voulurent avoir part à ses bonnes oeuvres, et la conjurèrent de permettre que quelques-unes d'entre elles l'accompagnassent dans cet exercice salutaire de la charité. Odile y consentit, et, considérant que sa communauté, devenue très nombreuse, se trouvait à l'étroit sur la montagne, elle résolut de choisir celles de ses moniales qui étaient habiles au service des pauvres, et de les transporter dans son nouvel établissement, tout en les maintenant sous sa direction. Elle leur fit donc bâtir une nouvelle église, vaste et somptueuse, et la nouvelle communauté prit le nom de Nieder-Munster. Les moniales changèrent d'habitation sans changer de moeurs ni d'abbesse. Les 2 maisons étaient semblables à 2 grands arbres qui paraissent séparés au dehors, et qui ont cependant la même racine et même principe de vie. Sainte Odile continuait à les gouverner avec autant de succès que de sagesse : elle se trouvait tantôt dans l'une, tantôt dans l'autre; le plus souvent dans celle où il y avait le plus à travailler. Mais la maison où elle allait le plus volontiers était l'hôpital de Saint-Nicolas : c'était là comme son jardin de délices, où elle se délassait chaque jour, autant que le lui permettait la conduite de 2 communautés nombreuses. L'air qu'on y respirait, tout infecté qu'il était, lui paraissait doux. Ses pieuses filles l'imitaient à l'envi, et faisaient, comme elle, une heureuse expérience du bonheur que l'on goûte lorsqu'on daigne s'abaisser jusqu'à consoler les pauvres et les misérables.
 


Saint Amand et saint Materne, Apôtres en Belgique, mais aussi en Alsace!
Chapelle des Larmes, 12ième siècle


Cependant le duc Adalric et sa femme Berswinde étaient déjà fort avancés en âge. Ils résolurent de consacrer leurs derniers jours à la prière, et firent savoir à Odile qu'ils voulaient se retirer auprès d'elle, jusqu'au moment où il plairait à Dieu de les appeler à Lui. Odile reçut ce message avec joie. Elle savait tout ce qu'il y avait de foi et de piété dans le coeur de sa mère, et tout le besoin de conversion de son père. La duchesse Berswinde s'était toujours distinguée par une vertu sans tache. Adalric se rendit donc à Hohenbourg avec Berswinde. Il y vécut quelques mois dans l'exercice des bonnes oeuvres, et y mourut bientôt, dans les sentiments de la piété la plus vive, entre les bras de sa fille (vers l'an 700). La pieuse Berswinde le suivit peu de temps après dans la tombe.

Odile, après la mort de ses parents, vécut encore de longues années dans la pratique des vertus les plus sublimes. Un jour, un lépreux se présenta à la porte du monastère pour demander l'aumône. Son corps répandait une odeur infecte, et personne n'osait se résoudre à approcher de lui. Odile, informée de sa présence, vint elle-même pour lui servir à manger. Mais, malgré son courage, elle recula d'abord à l'aspect repoussant de ce misérable. Puis, surmontant ce premier mouvement de la nature, elle se jette au cou du malheureux, et l'embrasse avec une générosité qui fait frémir les témoins de ce spectacle. Sa charité croissant par cette victoire sur elle-même, elle lui servit à manger avec une pieuse affection, et, levant les yeux au ciel, elle répétait d'une voix entrecoupée de sanglots, ces charitables paroles "Seigneur, ou donnes-lui la santé, ou accordes-lui la patience". Sa prière fut bientôt exaucée; la lèpre de cet infortuné disparut, et ceux qui étaient présents louèrent Dieu, qui avait glorifié la charité de Sa servante.

Odile continuait à visiter tous les jours l'hôpital de Nieder-Munster, situé au bas de la montagne; mais ses fatigues continuelles, jointes à son grand âge, avaient singulièrement affaibli ses forces. Sa charité était toujours aussi ardente, et un auteur contemporain raconte que Dieu la récompensa par un étonnant miracle. "Un jour", dit-il, "que la Sainte revenait seule à Hohenbourg, elle rencontra un pauvre étendu dans le chemin et mourant de soif et de fatigue. Ne pouvant courir assez vite pour chercher du secours à ce malheureux, elle mit toute sa confiance en Dieu, et, se souvenant de ce qu'avait fait autrefois Moïse, elle frappa de son bâton le rocher voisin. Il en sortit à l'instant une fontaine dont l'eau salutaire rendit la vie à ce mourant". Tel est le récit qu'on répétait dans la contrée quelques années après sa mort, et la fontaine miraculeuse, visitée encore aujourd'hui par un grand nombre de pèlerins, est célèbre dans tout le pays  par les guérisons qu'on attribue à la vertu de ses eaux. Les protestants eux-mêmes, aussi bien que les catholiques-romains, ont conservé pour ces lieux le respect traditionnel de leurs ancêtres. [En 2005, durant une fête de mariage, un protestant du coin m'en parlait à table, des vertus miraculeuses de cette eau, et il disait "sainte Odile", et non pas "la source d'Odile". Il avait lui-même constaté cela... JMD]

Les pauvres étaient les amis privilégiés d'Odile. Elle voulait qu'on leur témoignât toujours une charité compatissante, et elle avait expressément défendu de jamais leur refuser l'aumône. Souvent elle les servait de ses propres mains, et c'était toujours avec la tendresse la plus Chrétienne. Cette charité de l'abbesse soutenait la ferveur de ses moniales, qui se dévouaient, à son exemple, au soin des pauvres dans l'hôpital de NiederMunster.

Ainsi vivait cette sainte communauté, au milieu de laquelle Odile demeura jusqu'à un âge fort avancé, pleine de vertus. Son nom était béni dans toute l'Alsace, et les fidèles accouraient en foule à Hohenbourg pour bénéficier de son dévouement et écouter sa parole comme celle d'un apôtre. Quand elle vit sa fin approcher, elle assembla toutes ses filles dans la chapelle de Saint Jean le Baptiste, dont elle avait fait son oratoire particulier. "Ne vous alarmez pas", leur dit-elle, "de ce que je vais vous annoncer; je sens que l'heure de ma mort approche, et j'espère que mon âme s'envolera bientôt pour aller jouir de la liberté des enfants de Dieu". Puis elle découvrit â chacune d'elles les défauts à corriger, les dangers à craindre, et leur recommanda de rester surtout fidèles aux saintes pratiques qui les avaient jusqu'alors maintenues dans la ferveur. Odile, apercevant alors ses nièces, Eugénie, Gundeline et Attale, qui versaient des torrents de larmes "Mes chères filles", leur dit-elle, "vos pleurs ne prolongeront pas mes jours; l'heure est venue, il faudra bientôt partir. Allez seulement à l'oratoire de la Vierge réciter le Psautier et demandez pour moi la grâce de bien mourir". Elles allèrent prier, et quand elles revinrent auprès d'Odile, elles la trouvèrent plongée dans une extase si profonde, que, la croyant morte, elles s'abandonnèrent de nouveau aux larmes. Mais la Sainte se réveilla bientôt comme d'un profond sommeil, et leur raconta que Dieu l'avait transportée, en compagnie de sainte Lucie, dont on célébrait la fête ce jour-là (13 décembre), pour lui donner un avant-goût des biens ineffables du Ciel. Comme elle désirait ardemment recevoir le saint Viatique, les historiens de sa vie racontent que, pour satisfaire à sa sainte impatience, le Ciel voulut faire un nouveau miracle. Un Ange environné de lumière descendit auprès d'elle, en présence de toute l'assemblée, et lui présenta respectueusement un calice renfermant le corps et le sang précieux de Jésus-Christ. Quand Odile eut pris la sainte Communion, l'Ange disparut, et le vase sacré resta entre ses mains comme un témoignage de la faveur extraordinaire qu'elle avait reçue du ciel. C'est sans doute cette pieuse tradition qui a donné occasion aux iconographes, peintres et sculpteurs de représenter sainte Odile avec un calice entre les mains. On n'a jamais pu savoir de quelle matière il était fait. Hohenbourg a conservé un calice attribué à cette époque jusqu'en 1546, enchâssé dans de l'or et de l'argent. Le couvent de Hohenbourg avait un calice dans ses armoiries, datant de la période de la déchéance spirituelle.

Odile adressa à ses saintes filles un dernier adieu, et ses yeux, qu'un miracle avait ouverts autrefois, se refermèrent doucement à la lumière, le 13ème jour de décembre. La Sainte était pauvrement couchée sur la peau d'ours qui lui servait de lit, et son chaste corps, exténué de jeûnes et d'austérités, resta exposé pendant 8 jours dans l'église, répandant une odeur de sainteté qui embaumait tout le monastère. On lui rendit les derniers devoirs avec toute la solennité possible, et ses reliques vénérées furent déposées dans un tombeau qu'elle avait fait préparer elle-même dans la chapelle de Saint Jean le Baptiste, appelée dans la suite la chapelle de Sainte Odile.
 

     Sainte Odile, Patronne de l'Alsace, En pied, face
On la représente :
1° avec un livre ouvert sur lequel se trouvent 2 yeux; 
2° priant devant un autel pour l'âme de son père. Celui-ci est parfois conduit hors des flammes par un Ange; ou bien un rayon du Ciel fait connaître à la Sainte que ses prières sont exaucées.

 

CULTE ET RELIQUES. - MONUMENTS.

Aussitôt après la mort d'Odile, les habitants du pays vinrent en foule vénérer le tombeau de la sainte abbesse de Hohenbourg. L'Alsace, dont elle avait été l'ornement, la choisit pour patronne, et la montagne de Hohenbourg perdit son ancien nom pour porter celui de montagne de Sainte-Odile, sous lequel elle est maintenant désignée. Placée entre les Vosges et l'Alsace, elle domine une vaste étendue, où l'oeil découvre 20 villes et plus de 300 villages, séparés par des plaines, des forêts, des vignobles fertiles, des prairies entrecoupées de ruisseaux, au centre desquels le Rhin roule ses eaux majestueuses. Un chemin ombragé conduit au sommet de cette montagne, où le souvenir vénéré de sainte Odile s'est conservé si vivace depuis le 8ème siècle jusqu'à nos jours.
Une litanie de Saint-Emmeran de Ratisbonne, datant du 9ème siècle, invoque sainte Otilia.
Une Litanie de Freising, entre 957 et 994, ainsi qu'une litanie d'Utrecht, fin du 10ème siècle, font de même (Anal. Boll., tome 54, page 20, 27, tome 55, page 68). Le culte était donc déjà bien public, la sainteté reconnue : Odile était donc, stricto sensu, canonisée.

Le tombeau de sainle Odile fut ouvert pour la première fois en 1354, en présence de l'empereur Charles 4. Ce prince, attiré par le concours des peuples qui s'y rendaient, voulut y aller lui-même. Le corps de la Sainte fut trouvé entier, et on en détacha la partie antérieure du bras droit pour la donner à l'empereur. Cette relique précieuse fut déposée dans l'église cathédrale de Prague, et on l'honore encore aujourd'hui. Le tombeau de la sainte abbesse fit refermé en présence de l'empereur et de l'évêque romain de Strasbourg, Jean de Liechtemberg. A la demande des religieuses, ils firent dresser un acte de cette première reconnaissance, et défendirent, sous les peines les plus graves, d'ouvrir désormais ce précieux tombeau.



Tombeau de sainte Odile


Aux 14 et 15ème siècles, les Grandes-Compagnies, les Armagnacs et les Bourguigons envahirent successivement l'Alsace, saccagèrent Hohenbourg et en dispersèrent les religieuses. Au milieu de ces désolations, le tombeau de sainte Odile échappa cependant à la destractton, et quand l'orage fut dissipé, les religieuses se réunirent de nouveau autour de cet asile sacré et relevèrent les ruines de leur monastère. Mais la gloire de l'abbaye semblait éclipsée. La ferveur s'y affaiblit, et, en 1546, un accident y causa un incendie terrible, qui dévora tous les bâtiments.

Cette fois pourtant, Dieu sauva encore le tombeau de Sa servante, et les religieux Prémontrés, établis à une demi-lieue du monastère, n'abandonnèrent pas ce monument sacré. Tous les revenus des abbayes de Hohenbourg et Nieder-Munster furent annexés au domaine de l'évêque romain de Strasbourg, et on assigna une pension annuelle pour l'entretien de 2 chanoines Prémontrés sur la sainte montagne (1569). Cependant le monastère demeura enseveli sous ses ruines, jusqu'à ce qu'il fut restauré (1607) par les soins des dirigeants temporels du lieu, le cardinal Charles de Lorraine et l'archiduc Léopold. Dès lors les pèlerinages au Mont-Sainte-Odile recommencèrent avec une nouvelle ferveur, et les revenus des pèlerins affluèrent à l'évêché romain. Mais cette prospérité fut courte. En 1622, les Protestants envahirent l'Alsace, sous la conduite du comte de Mansfeld et du duc de Brunswick, et le monastère de Hohenbourg fut livré aux flammes. Quand les ennemis se furent retirés, François Bornius, curé d'Oberehnheim, envoya une dépuhation sur la montagne pour examiner les ruines de l'abbaye. Les envoyés, attristés par le spectacle qu'ils avaient sous les yens, eurent cependant la consolation de retrouver le tombeau de sainte Odile. On y remarqeait les traces des coups qu'y avaient portés les soldats; mais il était encore entier et n'avait pas été ouvert.

Cependant les chanoines Prémontrés, qui avaient quitté le mont Sainte-Odile à l'époque de l'invasion, y revinrent bientôt. L'église fut rebâtie et consacrée, en 1630, par les soins du comte Paul de Aldringen, suffrageant du diocèse romain, qui s'efforça de remettre en honneur le culte de sainte Odile.

Les Prémontrés restèrent les fidèles gardiens du tombeau de sainte Odile. A force de courage, de persévérance et de prédications, ils purent recueillir quelques aumônes pour orner les autels et les chapelles de la sainte montagne. Grâce à leurs efforts, la dévotion à sainte Odile recouvra son ancienne popularité, les pèlerins y accoururent de toute la province, et, en 1655, plusieurs princes et évêques assistèrent à la procession solennelle qui eut lieu pour l'ouverture du Jubilé. Cette dévolion ne fit qu'augmenter les années suivantes. Mais le sanctuaire de sainte Odile semblait réservé à des épreuves incessantes. En 1681, tous les édifices de la sainte montagne furent encore dévorés par les flammes, à l'exception des chapelles des Anges et des Larmes, que leur élévation au sommet d'un rocher préserva de l'incendie. Dans ce malheur cependant, les religieux ne perdirent point courage. Réduits à la plus extrême nécessité, ils continuèrent à veiller auprès du tombeau de la sainte patronne de l'Alsace, et virent encore une fois sortir de ses ruines l'église de Hohenbourg, qui fut achevée en 1692, et consacrée, en 1696, sous l'invocation de la sainte Vierge.

C'est ainsi que ce monastère, dont les souvenirs étaient si chers aux Alsaciens, sortit pour la 5ème fois de ses ruines. Malgré des calamités sans nombre, des invasions cruelles, le tombeau de sainte Odile n'a presque jamais resté sans gardiens fidèles. Il a été pieusement visité dans tous les temps par les habitants du pays, chez lesquels la dévotion envers sainte Odile est comme une tradition de famille. Les pèlerins s'y rendaient en chantant de pieux cantiques, qu'ils interrompaient pour se prosterner au pied des croix échelonnées sur le versant de la montagne. Ils visitaient toutes les chapelles avec dévotion, mais particulièrement celle des Larmes, ainsi appelés, disait-on, parce que sainte Odile y avait obtenu, par ses pleurs, la délivrance de son père, condamné à expier dans l'Hadès en attendant le Jugement dernier. Quand les pèlerins séjournaient sur la montagne, ils passaient la nuit dans l'église ou dans les chapelles, et y chantaient, en langue du peuple, des cantiques sacrés. Les Protestants eux-mêmes prenaient part à ces pieux exercices, et plusieurs ont trouvé à la sainte montagne des grâces de conversion.





   



La source sainte. 



Le monastère de Hohenbourg fut habité par des religieuses jusqu'à l'époque de la Révolution française. En 1790, l'assemblée nationale, largement maçonnique, ayant supprimé les voeux monastiques, on fit évacuer le couvent de Sainte-Odile. Mais le tombeau de la sainte patronne de l'Alsace existait toujours sur la montagne. C'en était assez pour que la piété populaire fût attirée dans ces lieux, même au milieu des plus mauvais jours. Des temps plus calmes succédèrent aux orages révolutionnaires, et la dévotion des Alsaciens pour leur glorieuse patreone a repris un nouvel élan. L'église qui s'élève maintenant sur le mont Sainte-Odile remonte à 1692. Elle est belle et solide, et à côté du choeur, se trouvent les 2 anciennes chapelles de la Croix et de Sainte-Odile. Près de là était l'ancienne demeure des religieuses. Depuis la Révolution, ces monuments sont passés entre les mains de plusieurs propriétaires. Au 19ème siècle, l'église a été rendue au culte.
En 1840, malgré l'interdit antique, le tombeau de sainte Odile fut ouvert en présence du clergé et de plusieurs médecins. L'année suivante, ses reliques furent déposées dans une grande et belle châsse, pour être exposées à la vénération des fidèles, sur l'autel même de la chapelle qui porte son nom. Cette translation eut lieu le 7 juillet 1841. Une multitude de fidèles, venus de l'Alsace, de la Lorraine et du grand-duché de Bade, s'étaient réunis, ce jour-là, sur la sainte montagne. La vieille église de Sainte-Odile était parée de branches de sapin et de guirlandes, et sa statue couronnée de fleurs. Les reliques de la Sainte étaient provisoirement déposées dans la maison conventuelle, et, sur la châsse qui les renfermait, en voyait la statue de la Sainte, couchée sur de simples coussins, tenant à la main un livre d'office liturgique, ayant la crosse abbatiale à ses côtés, et revêtue d'un costume sous lequel elle est représentée dans les anciens monuments empreints d'anachronisme, la vie canoniale n'ayant été entamée à Hohenbourg qu'en 816..
A 9 heures du matin, la procession, composée de 80 prêtres, ayant à leur tête le curé d'Oberehnheim, sortit de la chapelle de Sainte-Odile pour aller chercher les saintes reliques. Elles furent portées par 6 prêtres, et sur leur passage la foule s'inclinait respectueusement, en joingant les mains et en versant des larmes de joie. La châsse fut déposée dans l'église, au milieu des chants solennels. Elle y resta exposée pendant 8 jours à la vénération des fidèles, et on en a compté jusqu'à 1500 dans un jour, qui vinrent prier l'auguste patronne de l'Alsace.
C'est ainsi que Dieu S'est plu à glorifier jusqu'aux temps présents la sainte fille d'Adalric. Malgré les révolutions et les désastres, ses reliques sont restées sur la montagne qu'Odile avait embaumée de ses vertus, et son nom est un de ceux que les peuples bénissent éternellement. Il est inscrit dans les martyrologes de l'Eglise (aussi de Rome), et le diocèse romain de Besançon a gardé fidèlement le culte de cette sainte fille, dont le monastère de Baume conserva, jusqu'à la fin, le souvenir vénéré. Sa fête se célèbre, dans le bréviaire bisontin, sous le rite semi-double, le 14 décembre (transférée du 13).

Tiré des "Saints de Franche-Comté", par les professeurs du collège Saint-François-Xavier de Besançon. - Cfr "Saints d'Alsace", par l'abbé Hunckler; "Histoire de sainte Odile", par le vicomte Marie-Théodore de Bussierre.
La version du martyrologe de Florus de Lyon, compilée à Echternach (12ème siècle) et celui de Toul (vers 1300) la reprennent. La Vita aurait été rédigée peu avant 950 à Hohenbourg, mais très maladroitement, en y incorporant bien des pratiques et détails postérieurs de 3 siècles aux faits, et y rajoutant quantité d'erreurs historiques. Comme aussi des personnages inexistants ou d'autres époques, p. ex. un "empereur" Childéric, un maire du palais "Liuthéric", un "roi Marcellian". Etc. "Vita" dans MGH, tome 6, 1913, p. 24-50.

Au Mont-Sainte-Odile (comme dans la plupart des endroits d'Occident hélas), on ne trouve plus grand chose comme héritage spirituel après le 11ème siècle. Mais il faut mentionner le remarquable travail de récit biblique enluminé qui y fut réalisé au 12ème siècle, le "Hortus Deliciarum". Hélas, l'original fut détruit lors de l'invasion de l'Alsace par l'Allemagne en 1870, quand Strasbourg fut incendiée - on se demande ce que fichait à Strasbourg un livre d'une abbaye qui normalement ne devait pas en dépendre, passons.. Heureusement, une partie de ce précieux ouvrage avait été recopiée avec soin par divers auteurs au préalable. On y a donc encore accès partiel, et des versions informatisées sont produites.

 

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Hymne Acathiste à Sainte Odile

(Acathiste composé par Claude Lopez-Ginisty à la gloire de Dieu et de sa sainte moniale Odile)


Kondakion 1

Tes pieux parents prièrent le ciel, afin qu'il leur accorde la grâce d'un enfant, mais lorsque tu vins au monde, déçu de n'avoir pas un fils et de te voir aveugle, ton père te considéra comme une malédiction et te chassa, mais nous nous écrions vers Dieu: Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Ikos 1

Tu fus transporté en un lieu éloigné, afin que ne puissent te voir ceux qui possédaient la vue, car t'ayant donné la vie, ils te refusèrent l'amour, ta mère te confia à la très sainte Mère de Dieu et au Christ, en leur sainte garde, tu fus sauvée pour que nous nous écrions:

Réjouis-toi, que Dieu mit à part dès la naissance,
Réjouis-toi, qui fus adoptée par le ciel,
Réjouis-toi, qui eus le Christ pour frère,
Réjouis-toi, qui eus pour mère celle des croyants,
Réjouis-toi, qui dès l'enfance reçus la protection d'en-haut,
Réjouis-toi, qui gardas les yeux fermés sur le monde cruel,
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!


Kondakion 2

Pour ne pas provoquer l'ire de ton père, tu n'existas plus au monde qui l'entourait, et quand on parla de cette mystérieuse enfant noble, qu'élevait une amie de ta mère, celle-ci dut se résigner à t'éloigner plus encore et à te confier à Dieu auquel nous crions: Alléluia!

Ikos 2

Tu fus exilée au ciel sur la terre, confiée aux moniales de Baume, tu fus reçue avec joie, l'higoumène t'offrit sa maternelle affection, tu vécus ainsi au rythme de la louange de Dieu et respiras l'encens des psalmodies élevées vers Lui et nous te disons:

Réjouis-toi, qui fus élevée dans la prière,
Réjouis-toi, qui vécus bercée par les psaumes,
Réjouis-toi, qui connus l'Amour divin dès le berceau,
Réjouis-toi, qui ignoras le mal dès ton jeune âge,
Réjouis-toi, qui fus préservée dans le havre de Dieu,
Réjouis-toi, qui grandis dans le sacrifice de l'Amour,
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 3

Dès ton plus jeune âge tu fus instruite dans la foi, privée de la lumière du corps, tu reçus abondamment celle d'en-haut, venue dans le monde pour sauver les pécheurs qui reconnaissants s'écrient vers Dieu: Alléluia!

Ikos 3I

Si tu ne pouvais marcher sur les sentiers terrestres, ton cœur par la prière visitait le Royaume céleste, il s'ouvrait à l'Amour du Ressuscité, te disposait à la vertu et à la fidélité, nous émerveillant de ta sagesse précoce et de ta patience nous t'acclamons ainsi:

Réjouis-toi, petit enfant venu au Christ,
Réjouis-toi, colombe dans le temple de Dieu,
Réjouis-toi, offrande de l'innocence,
Réjouis-toi, sacrifice de pureté,
Réjouis-toi, louange agréable,
Réjouis-toi, vierge sage,
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 4

Saint Erhard, de Ratisbonne eut un jour une vision, Dieu lui demanda d'aller au monastère de Baume, pour y baptiser une servante du Christ aveugle, lui donner le nom d'Odile afin qu'elle recouvre la vue et s'écrie vers Dieu: Alléluia!

Ikos 4

Tu reçus la sainte illumination de l'Esprit à douze ans, et par une grâce divine, il te fut accordé de recouvrer la vue du corps, alors Saint Erhard bénit un voile qu'il posa sur ta tête, il annonça que Dieu te réservait encore des grâces merveilleuses et nous te clamons:

Réjouis-toi, qui vis la Lumière au jour de ton baptême,
Réjouis-toi, que Dieu montra au saint hiérarque,
Réjouis-toi, affermissement des baptisés,
Réjouis-toi, exemple de la grandeur des sacrements,
Réjouis-toi, espérance de bénédictions divines,
Réjouis-toi, réceptacle des miracles de Dieu,
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!


Kondakion 5

Saint Hidulphe, frère de Saint Erhard ayant assisté au prodige, alla annoncer la bonne nouvelle à ton père pris de honte au souvenir de sa bassesse, celui-ci ne voulut point te faire revenir, il te laissa te fortifier dans la vertu et s'exclama vers Dieu: Alléluia!

Ikos 5

L'ardeur de ton zèle et la profondeur de ta dévotion te firent égaler en sagesse les moniales de Baume, toi qui n'avais pas prononcé de voeux sinon dans ton cœur et dans tes actes, admirant ton impeccable cheminement, nous te louons:

Réjouis-toi, triomphe de la vertu,
Réjouis-toi, joie de l'ascèse,
Réjouis-toi, pur élan vers Dieu,
Réjouis-toi, vivante oraison,
Réjouis-toi, oblation discrète,
Réjouis-toi, spiritualité incarnée,
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la Guérison!

Kondakion 6

Dieu avait béni ton père lui donnant quatre fils et une autre fille, ayant entendu parler d'Hugues ton frère, tu voulus le connaître et tu lui écrivis pour qu'il intercède auprès de votre père afin qu'il accepte ton retour ayant reconnu ta grande tendresse et ton élévation spirituelle Hugues accepta et chanta vers Dieu: Alléluia!

Ikos 6

Ton père ne voulut pas accepter les supplications éloquentes de ton frère, alors Hugues pensant que ta seule présence le convaincrait, t'appela auprès de lui, tu fis tes adieux à Baume et te mis en chemin vers la tendresse du foyer familial abimée dans la prière admirant ton esprit de pardon et ta longanimité, nous te disons:

Réjouis-toi, qui voulus honorer ton père et ta mère
Réjouis-toi, qui revins aux lieux de ton malheur
Réjouis-toi, qui sus pardonner
Réjouis-toi, douceur de la longanimité
Réjouis-toi, paradigme de la charité
Réjouis-toi, modèle de l'amour filial et fraternel
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 7

Lorsqu'il te vit ton père fut irrité, il frappa ton frère pour sa désobéissance, mais tu te jetas à ses pieds et lui baisas les mains et t'ayant embrassée, il oublia son courroux et t'accueillit et ton cœur chanta vers Dieu: Alléluia!

Ikos 7

Ta mère baisa tes yeux pour lesquels ton père te rejeta par lesquels le Père Céleste manifestas Son amour et Sa grâce en toi, tu réintégras la tendresse paternelle car ta douceur, la simplicité de ta vie et ta charité surent mieux que les mots le convaincre, que cette grâce d'une vie exemplaire nous soit donnée à nous qui te disons:

Réjouis-toi, réconciliation en Christ
Réjouis-toi, réceptacle de la concorde
Réjouis-toi, simplicité de l'âme en Dieu
Réjouis-toi, précieux joyau de la fraternité
Réjouis-toi, trésor de bonté
Réjouis-toi, douce persuasion de la faiblesse
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 8

Ton père voulut par l'hymen te procurer la richesse du monde, instruit de ses projets, tu refusas le mariage car tu aspirais à la sainte solitude du monachisme, mais l'appel de Baume qui avait retenti dans ton cœur, il ne le voulut point entendre et tu supportas l'épreuve dans la prière criant à Dieu dans tes larmes : Alléluia!

Ikos 8

Tu ne voulus pour époux que le Seigneur Christ, pour ce faire tu repris secrètement le chemin de l'exil déguisée en mendiante, tu traversas le Rhin, et découvrant un havre de solitude écarté, tu vécus loin du monde, devant ta résistance aux mirages de gloire mondaine, avec ferveur nous te crions:

Réjouis-toi, épouse du Christ
Réjouis-toi, amante de la vie monastique
Réjouis-toi, zélatrice de la sainte solitude
Réjouis-toi, rempart des moines et des moniales
Réjouis-toi, affermissement des vocations
Réjouis-toi, bastion inexpugnable de l'Esprit
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 9

N'ayant pu briser ta détermination, ton père accepta ta vocation sainte, il te donna un château pour que tu puisses comme tu l'entendais organiser un monastère de vierges qui sans cesse s'écrieraient vers Dieu: Alléluia!

Ikos 9

Ta communauté reçut les meilleures enfants du pays, tu offris au Christ des églises et chapelles innombrables, où abeilles saintes, les moniales offraient comme du miel, leurs prières, leur ascèse et leur vie toute entière, instruites par ta vie, comme elles nous t'acclamons:

Réjouis-toi, architecte des églises de Dieu
Réjouis-toi, direction spirituelle des ascètes
Réjouis-toi, conductrice de la prière
Réjouis-toi, fierté du monachisme
Réjouis-toi, orgueil de l'oraison
Réjouis-toi, havre de vie spirituelle
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 10

Voulant sans cesse te remémorer la Sainte Trinité, tu plantas trois tilleuls près de ton monastère, et tu dédias tes églises et chapelles à la Très Sainte Mère de Dieu, à la Sainte et Vivifiante Croix et à Saint Jean-Baptiste élevant vers Dieu ta sainte voix pour dire: Alléluia!

Ikos 10

L'oratoire du saint Prodrome et Baptiste Jean, tu le construisis pour honorer le jour de ton saint baptême, Dieu te bénit encore abondamment car il envoya vers toi le saint Apôtre Pierre et une milice céleste pour le consacrer, c'est dans cette chapelle que tu fus déposée pour que nous puissions te chanter:

Réjouis-toi, qui fus digne des hôtes célestes
Réjouis-toi, qui reçus l'Apôtre Pierre ici-bas
Réjouis-toi, ange dans la chair
Réjouis-toi, initiée de la grâce
Réjouis-toi, bénédiction tangible
Réjouis-toi, pilier de l'Eglise
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 11

Menant une dure vie d'ascèse , tu passais tes nuits en vigiles orantes, ne t'accordant repos que sur une grossière peau d'ours, vivant cette vie dure, tu voulus adoucir celle des pèlerins des sanctuaires voisins, tu fis construire pour eux un hospice et une église dédiée à Saint Nicolas, ce dont ils rendirent grâces à Dieu, disant : Alléluia!

Ikos 11

Attirés par ton exemple splendide et joyeux tes parents résolurent dans leur vieil âge de consacrer leurs derniers jours à Dieu, ils voulurent L'attendre en la sainte compagnie des solitaires consacrées au Christ et dans tes bras tu les remis au Père des Lumières, après qu'ils se fussent retirés du monde pour te rejoindre, inspire-nous à nous aussi de saintes résolutions, tandis que nous te disons:

Réjouis-toi, exemple de sainteté
Réjouis-toi, modèle de vie parfaite
Réjouis-toi, inspiratrice des saintes décisions
Réjouis-toi, borne lumineuse sur le Chemin
Réjouis-toi, écho de l'harmonie céleste
Réjouis-toi, rayon du soleil spirituel
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 12

Tu soignas les malades avec amour sans discontinuer, tu embrassas même un lépreux devant lequel tu avais d'abord reculé, trouvant sur le chemin un blessé et n'ayant pas d'eau, tu frappas un rocher et ta foi en Christ en fit jaillir de l'eau, devant ta grande confiance en Dieu, nous nous écrions vers Lui: Alléluia!

Ikos 12

Cette fontaine que tu fis jaillir tel Moïse dans le désert, elle fut source de guérisons innombrables et l'eau salutaire qui en jaillit continue de manifester la ferveur de ta prière en guérissant ceux qui t'acclament ainsi:

Réjouis-toi, intercession efficace devant le Roi de gloire
Réjouis-toi, guérison des multitudes
Réjouis-toi, espérance des sans-espoirs
Réjouis-toi, baume sur les plaies
Réjouis-toi, miracle de l'amour du Christ
Réjouis-toi, délivrance de la cécité
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 13

Tu connus l'heure de ton trépas et l'annonças à tes moniales priant pour toi, elles virent un ange t'apporter la Sainte Communion, et lorsque tu fermas tes yeux pour les ouvrir à la Lumière céleste, c'était la fête de Sainte Lucie, ton corps exhala un parfum suave qui embauma leur prières tandis qu'elles chantaient Alléluia!

Ikos 1

Tu fus transporté en un lieu éloigné afin que ne puissent te voir ceux qui possédaient la vue, car t'ayant donné la vie, ils te refusèrent l'amour, ta mère te confia à la très sainte Mère de Dieu et au Christ, en leur sainte garde, tu fus sauvée pour que nous nous écrions:

Réjouis-toi, que Dieu mit à part dès la naissance
Réjouis-toi, qui fus adoptée par le ciel
Réjouis-toi, qui eus le Christ pour frère
Réjouis-toi, qui eus pour mère celle des croyants
Réjouis-toi, qui dès l'enfance reçus la protection d'En Haut
Réjouis-toi, qui gardas les yeux fermés sur le monde cruel
Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Kondakion 1

Tes pieux parents prièrent le ciel afin qu'il leur accorde la grâce d'un enfant, mais lorsque tu vins au monde, déçu de n'avoir pas un fils et de te voir aveugle, ton père te considéra comme une malédiction et te chassa, mais nous nous écrions vers Dieu: Réjouis-toi, Sainte Odile par qui le Christ nous accorde la guérison!

Prière à Sainte Odile

Sainte Odile, toi qui connus dès l'enfance l'abandon et les épreuves, mais qui vécus depuis ton plus jeune âge dans la prière et l'ascèse, toi qui recouvras la vue en recevant la sainte illumination du baptême et qui consacras ta vie à soulager la misère spirituelle, matérielle et physique de tes frères et soeurs, prie le Christ notre Dieu de nous accorder par tes saintes supplications, le renouvellement de notre vue afin que nos yeux, renonçant au péché s'astreignent à ne contempler que Sa pure gloire, que notre corps purifié soit mis à Son service, que notre esprit soit lavé ainsi que notre âme de ses péchés, afin que nous soyons dignes de participer à l'avènement de son royaume. Amen.


 

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Bel Office byzantin à sainte Odile, patronne de l'Alsace, en grec, par le protopsaltis Panagiotis Somalis :
http://membres.lycos.fr/stmaterne/psomalis/odilia.pdf   
Il est demandé à celles et ceux qui célèbreront cet Office de bien vouloir y commémorer pour Panagiotis les personnes suivantes :
a. son défunt père Michael, partit pour le Royaume Eternel le 21/2/2005
b. l'évêque de Telmessos, mgr Hristoforos, qui a été 8 ans évêque auxiliaire à Londres et son père spirituel durant leur séjour commun en Angleterre.

Article crée le: 30-11-2013.

Dernier revision le: 30-11-2013.

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